Par Clément Bigot, juriste et consultant, (@AssasParis2), le 14 décembre 2019

Berges de la Moskova

Berges de la Moskova, Moscou, 2014 – Crédit photo : Swann Bigot

Maxime Orechkine, le ministre russe du développement économique et Bruno Le Maire, le ministre français de l’Économie et des Finances ont signé le 10 décembre une déclaration d’intention relative au développement de la coopération bilatérale dans le domaine du financement à long terme.

Le document a été signé à l’issue d’une réunion à Moscou du Conseil russo-français sur les questions économiques, financières, industrielles et commerciales (CEFIC).

Selon Bruno Le Maire, la Russie et la France envisagent de lancer un mécanisme de financement conjoint des projets franco-russes au cours des six prochains mois.

Le CEFIC devrait […] nous aider à développer le financement de nos projets. Vous connaissez vous-même les sanctions américaines, qui peuvent dans une certaine mesure geler des financements. C’est un problème. Mais nous devons parler des problèmes“, a déclaré le ministre français.

Au cours des six prochains mois, dans le respect de toutes les conditions du droit international, nous nous engageons à lancer des cofinancements, des financements franco-russes de projets … Nous chercherons des solutions innovantes“, a-t-il ajouté.

Fin octobre, Maxime Orechkine avait déclaré lors d’une visite à Paris que les banques françaises n’étaient pas pressées de revoir leurs approches de financement des clients russes, notamment en raison des sanctions américaines et européennes. Il avait noté que cette question serait discutée lors de la prochaine réunion du CEFIC.

Le dialogue entre Paris et Moscou concerne aussi la fiscalité numérique.

Ainsi, Bruno Le Maire a publié sur son compte Twitter officiel :

« Lors du #CEFIC mon homologue Maxime Orechkine m’a assuré que la Russie soutient une solution à l’OCDE sur la taxe numérique. Ce soutien est important pour arriver à un accord international sur ce sujet  début 2020. »

Cette réunion et cet engagement à créer conjointement des instruments de financement innovants et s’affranchissant de l’effet des sanctions américaines succède au sommet en « Format Normandie » organisé par le Président français Emmanuel Macron à Paris le 9 décembre. Ce sommet a constitué une avancée réelle dans le règlement du conflit à l’Est de l’Ukraine et marque la volonté de Moscou et de Paris de travailler ensemble sur des dossiers majeurs pour l’Europe.

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Le rôle du CEFIC est de donner une impulsion aux grandes priorités de la relation bilatérale franco-russe par des rencontres de haut niveau et par l’intermédiaire de groupes de travail thématiques, pilotés par les administrations compétentes.

Le CEFIC a eu pour principal objectif en 2019 d’approfondir les relations économiques existantes entre la France et la Russie en se fondant sur leurs partenariats stratégiques, mais aussi de lancer de nouvelles coopérations.

Paris souhaite mener une réflexion sur des modalités de financement innovantes pouvant être mises en place pour garantir le succès de ces nouveaux projets économiques entre la France et la Russie, dans le respect du droit international.

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Lors de la conférence de presse, le ministre de l’économie Bruno Le Maire a déclaré :

« Nous sommes décidés à aller beaucoup plus loin et à franchir de nouvelles étapes dans la relation économique et financière entre la France et la Russie ».

Le communiqué de presse de l’ambassade de France a indiqué que le ministre français sera de retour à Moscou au printemps 2020, dans le cadre d’une visite bilatérale préparatoire à un déplacement du Président de la République Emmanuel Macron.

La coopération entre Paris et Moscou a été relancée par le Président Macron depuis 2017, dans une volonté de réconciliation et de renforcement de la balance stratégique au profit d’une grande Europe incluant la Russie, en droite ligne du projet de “Maison commune européenne”, évoqué par le dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev dès 1985 lors d’une visite officielle à Paris et soutenu par le Président français François Mitterrand.

Si cette idée de “Maison commune européenne” de Lisbonne à Vladivostok, a souffert du fossé politique et stratégique grandissant entre la Russie et l’Europe par l’intermédiaire de l’Alliance atlantique dès le milieu des années 1990, la conjoncture actuelle apparaît être plus favorable au dialogue et à la coopération. Il s’agit d’éviter que la Russie ne se tourne complètement vers la Chine et de façonner une politique étrangère européenne affirmée dans sa relation avec le grand voisin russe. La lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée sont aussi des intérêts communs. La tâche de la France sera de convaincre les autres Etats membres de l’Union européenne de la nécessité du dialogue avec la Russie, la confrontation lésant toutes les parties. L’Allemagne pourrait être un allié dans ce dossier, tant la relation entre Berlin et Moscou est spécifique. Les échanges économiques entre la Russie et l’Allemagne sont également importants et influencent les comptes.

C’est dans cette dynamique que s’inscrivent l’accord entre les ministres Bruno Le Maire et Maxime Orechkine ainsi que le sommet du 9 décembre à Paris en “Format Normandie” pour faire avancer la paix à l’Est de l’Ukraine.

Les prochains mois et la visite du Président Macron à Moscou en 2020 en révéleront davantage sur le rééquilibrage diplomatique à l’oeuvre.

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